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Une période sensible pour le gouvernement
vendredi 18 décembre 2020, par - Au fil des jours - Energies - Climat - Développement Durable
De plus en plus les engagements et les discours du président Macron en matière de lutte contre les dérèglements climatiques se révèlent, à l’épreuve des résultats, contradictoires avec l’action réelle du pouvoir.
Les engagements de la France de la COP 21 :
Le cinquième anniversaire de la signature des accords de Paris est l’occasion de faire un bilan sur les engagements pris par les différents Etats. Et là, le constat est terrible : très peu de pays ont tenu leurs engagements de diminution des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES). Et la France, qui se targue d’avoir mené les négociations il y a 5 ans, figure parmi les pays les plus en retard ! Les mesures affichées par le gouvernement depuis 3 ans ne sont absolument pas à la hauteur des enjeux : dans les faits, la priorité est toujours donnée aux intérêts financiers au bout du compte.
Avant même que le Conseil d’Etat ne se prononce sur la plainte des organisations écologistes regroupées dans la mobilisation « L’Affaire du siècle » (qui a recueilli plus de 2 millions de signatures), la démonstration de l’engagement insuffisant du gouvernement français en faveur du climat est faite.
Le contre-feux de l’Europe :
Pour masquer ce résultat bien peu glorieux, le président Macron a multiplié ses actions diplomatique, particulièrement au niveau européen. Il a contribué, et c’est positif, à l’engagement de l’Union Européenne à réduire ses émissions de GES d’au moins 55 % en 2030, pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
C’est intéressant, mais à condition que cet engagement soit tenu avec sérieux.
Le Conseil Citoyen pour le Climat :
Car en matière d’engagements, ce qui se passe à la suite du travail de ce Conseil Citoyen met en évidence le double discours du président Macron et du pouvoir. Les 150 mesures proposées devaient être, « sans filtre », soit appliquées par décrets, soit faire l’objet de propositions de loi, soit faire l’objet d’un référendum.
Or on constate que des propositions en nombre de plus en plus grand sont simplement écartées, que d’autres sont mises en œuvre, mais complètement édulcorées et détournées (ex : le malus pour les automobiles fondé sur le poids qui ne concerne plus que les grosses voitures étrangères), et que pour certaines, le gouvernement fait exactement l’inverse, comme pour la demande de débat public préalable à l’attribution des fréquences aux opérateurs, sèchement assimilée à un « retour à la lampe à pétrole » par Emmanuel Macron !
Finalement le président se retrouve pris en défaut par rapport à ses promesse initiales et une bonne partie des membres de ce Conseil citoyen restent très mobilisés et actifs dans les médias.
Rappel : tout cela est tombé en même temps que le résultat de l’enquête parlementaire du sénat qui a mis en cause la gestion de la crise du COVID par le gouvernement au premier trimestre de l’année (imprévoyance sur les masques, mauvaise gestion des commandes, contre-vérités pour masquer ces manques, …).
La 5G et le Haut Conseil pour le Climat :
Enfin, le Haut Conseil pour le Climat (instance créée par Emmanuel Macron) est revenu sur la question du déploiement de la 5G. (cf. L’article du Monde du 20/12/2020)
Il affirme que l’impact de la 5G sur l’environnement sera important : suivant les scénarios, les émissions actuelles de 15 millions de tonnes de CO2 liés au numérique seront d’ici 2030 augmentés de 2,7 à 6,7 millions de t. Pour 75 %, cette augmentation représente la prise en compte de la fabrication à l’étranger de l’ensemble des smartphones qu’il faudra changer. De plus, la consommation électrique va augmenter de 5 à 13 % selon les scénarios.
Le Haut Conseil pour le climat regrette qu’un débat public et une évaluation environnementale sur ces questions n’aient pas eu lieu avant l’attribution des fréquences aux opérateurs de téléphonie. Il recommande qu’ils aient lieu avant l’attribution de nouvelles fréquences.
Parallèlement, deux associations environnementales (Priartem et Agir Pour l’Environnement) ont saisi le Conseil d’État sur cette question. Pour le moment, le rapporteur public a donné raison aux associations dans son réquisitoire. Le Conseil d’État doit rendre sa décision dans deux semaines. S’il suit la position du rapporteur, cela pourrait donner « un sérieux coup de frein au déploiement de la 5G en France, mais aussi à l’étranger », selon l’avocat des associations.
Le coup de bluff du référendum :
Le 14 décembre dernier,devant les nombreuses critiques des membres de la Convention Citoyenne pour le Climat, Emmanuel Macron a annoncé qu’il souhaite organiser un référendum pour intégrer à l’article 1 de la constitution que « La République garantit la préservation de la biodiversité, de l’environnement et lutte contre le dérèglement climatique. ».
Sur le fond, la présence dès l’article 1 de la constitution, d’un tel engagement peut faciliter les démarches juridiques permettant d’obliger l’État à prendre des mesures effectives pour le climat et la biodiversité. Mais en même temps, certains disent qu’il ne s’agit pas d’un progrès énorme, puisque la charte pour l’environnement est déjà annexée à la constitution.
D’un point de vue plus politique, on peut penser qu’il s’agit d’une manœuvre permettant au président Macron de détourner l’attention par rapport à la grande insuffisance de sa politique pour la transition énergétique et environnementale, au profit d’un débat juridique de principe : grand avantage pour lui, cela peut durer plusieurs mois, puisqu’un projet de référendum doit d’abord être approuvé par chacune des chambres dans des termes identiques.
Or, il est peu probable que la droite majoritaire au Sénat laisse faire un tel référendum à moins d’un an de la présidentielle … à moins que ce référendum se transforme en plébiscite pour ou contre Macron.
Bref, tout ce qui faut pour brouiller les cartes et accentuer un peu plus le divorce entre les citoyens et la politique...
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