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Intervention des sénateurs écologistes
Pour une politique territoriale du logement
vendredi 3 février 2023, par - Au fil des jours - Développement Durable
Pouvoir vivre au pays : les sénateurs écologistes défendent une loi pour une politique
territoriale du logement
Le logement n’est pas un bien comme les autres. Il détermine tous les aspects matériels de notre vie, l’accès à un travail et à l’éducation, aux équipements que nous utilisons au quotidien, les commerces comme les services publics de proximité. Plus encore, il ancre nos existences dans la richesse de nos territoires, dans leurs histoires et leurs traditions, et les multiples connexions collectives et familiales dont ils sont le foyer.
L’augmentation forte du prix des logements remet aujourd’hui en cause ce droit à pouvoir « vivre au pays ». Depuis les années 90, cette hausse est considérable, d’abord à Paris et dans les métropoles, mais aussi dans les zones littorales, où l’explosion des résidences secondaires, confortée par le phénomène Airbnb, a, en quelques années, bouleversé l’équilibre de l’habitat et empêchent de nombreux citoyens de vivre dans les communes où ils ont grandi. Cette dynamique progressive et auto-alimentée par la spéculation immobilière se traduit par un sentiment d’exclusion qui nourrit le populisme. Avec la pandémie, le phénomène s’accélère encore et risque de mener, si nous ne l’inversons pas, à une grave désagrégation sociale et territoriale.
De multiples politiques publiques peuvent concrètement y répondre. Mais, confrontées à la gravité de la situation et à ses conséquences, les collectivités doivent jouer un rôle de premier plan. Nous devons en conséquence les armer en leur donnant les moyens et les outils nécessaires en matière de politique du logement.
Au Sénat, « chambre des territoires », les écologistes agissent
Par la proposition de loi du Groupe Écologiste – Solidarité et Territoires du Sénat, discutée jeudi 2 février au Sénat dans le cadre d’une « niche parlementaire », les sénateurs peuvent décider d’agir. Face à la spéculation immobilière concentrée dans certaines zones, les sénateurs écologistes, derrière l’auteur Ronan Dantec et les chefs de file Paulu-Santu Parigi, et Daniel Breuiller
, demandent de renforcer le pouvoir des collectivités dans la politique du logement, de renforcer leur capacité à fournir des logements accessibles, notamment en renforçant les moyens des établissements publics fonciers locaux.
Les outils que nous proposons s’inscrivent aussi dans une logique de renforcement de leur autonomie fiscale. Les régions et les EPFL auront la possibilité d’augmenter les taxes sur les résidences secondaires, à un taux qu’elles fixeront. Grâce à ces nouvelles marges de manœuvre, les acteurs locaux pourront renforcer produire et réhabiliter de l’habitat, renforcer l’accès au logement pour le bien-être de tous les habitants.
Lutter contre la relégation
La crise du logement se traduit par un phénomène de relégation, alimenté notamment par une spéculation immobilière endogène dans certaines zones tendues, en partie liée au nombre croissant de résidences secondaires, notamment dans les zones où leur part atteint des niveaux insoutenables. En Corse, leur part atteint près d’un tiers, et concerne en grande majorité les non insulaires. Une analyse plus fine éclaire encore davantage l’ampleur du phénomène : leur part dépasse 50 % dans la
Communauté de communes Sud Corse, où elles sont détenues à plus de 50 % par les 10 % les plus aisés[2]. En Bretagne, lephénomène s’intensifie, nourri par la pandémie qui a modifié les aspirations de nombreux français. Cette part s’élève jusqu’à 72 % dans la Communauté d’agglomération de Guingamp Paimpol Armor Argoat, anciennement communauté de communes Callac-Argoat. La même dynamique s’observe, avec la même intensité, en Nouvelle Aquitaine. Ce constat n’est pas exhaustif, et n’épargne pas les villes : Paris compte aujourd’hui 150 000 résidences secondaires.
Conséquence directe : une inflation immobilière alimentée par la spéculation.
Des logements vacants, qui ne sont parfois jamais habités par leur propriétaire, simples investisseurs qui misent sur les recettes de Airbnb et la dynamique inflationniste. Des logements que les résidents permanents ne peuvent plus se permettre, pourtant situés où ils travaillent, y vivent la majeure partie de l’année et y sont souvent nés. Des logements construits à la hâte au prix de paysages dénaturés, de la biodiversité et du climat.
Conséquences indirectes : une concentration spatiale des activités et une relégation qui s’auto-entretiennent.
A côté des zones d’activités en plein essor, des zones paupérisées consécutives de la relégation, où les lieux de
sociabilisation, les équipements et services de proximité comme la santé disparaissent. Des activités non plus alignées sur le tissu industriel et social dont les territoires font leur plus-value, leur renommée et leur fierté, mais façonnées par une demande touristique éphémère.
La proposition de loi des sénateurs écologistes ne remet pas en cause le droit de propriété. Au contraire, elle le protège et le réaffirme comme un droit. En conséquence, le marché du logement doit être réintégré dans des projets territoriaux pensés collectivement. Elle réaffirme que la priorité ne doit pas être une loi pour sanctionner celles et ceux qui n’y ont pas accès, comme le fait la loi « Anti-Squat » actuellement débattue au Sénat. Notre responsabilité est d’apporter rapidement des solutions pour que chacun puisse vivre sous un toit, là où il l’aspire. Pour cela, il faut soutenir la capacité à agir des collectivités et des acteurs locaux.
Dernière nouvelle : La proposition de loi a été présentée en séance publique du Sénat le 2 février 2023. Résultat du vote : REJET.
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