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Le barrage de Sivens officiellement remis en cause
vendredi 16 janvier 2015, par - Au fil des jours - Développement Durable
Après les tragique évènements et la mort de Rémy Fraisse, les travaux avaient été suspendus et le gouvernement a demandé à deux spécialistes d’expertiser le projet, en lien avec les protagonistes (syndicat agricole FDSEA et opposants écologistes).
Ce rapport vient d’être remis et estime que le projet "n’apparaît pas comme une solution adaptée", conclusion reprise par la ministre de l’environnement (Ségolène Royal).
Les experts estiment que les besoins en eau peuvent être limités à 750 000 m3 (le projet initial prévoyait le double).
Ils proposent "deux options". La première envisage "la réalisation d’un réservoir de taille plus réduite sur le site de Sivens". La seconde inclut plusieurs retenues combinées, notamment en amont du site.
La première est moins coûteuse, mais suppose la destruction de 6 hectares de zones humides (pour le projet initial, c’était 13 hectares). Il faudrait donc ajouter le coût des compensations, soit la création de 12 hectares de nouvelles zones humides.
La seconde est "un peu plus coûteuse » en investissement et en fonctionnement, mais « ses impacts environnementaux sont faibles".
Les experts n’ont pas réussi à obtenir un consensus entre les protagonistes. La FDSEA défend à tous crins le projet initial et menace d’avoir recours à "toute autre forme d’action syndicale pour se faire entendre".
Pourtant les agriculteurs auraient intérêt à ce qu’un compromis soit trouvé. En effet, la Commission européenne a engagé une procédure d’infraction contre le gouvernement français pour infraction à la loi sur l’eau (et les zones humides). Or, le projet initial reposait sur une participation à l’investissement pour un tiers par les fonds européens. Sans cette participation de l’Europe, le projet serait compromis.
De son côté, le Vice-Président du Conseil régional, Gérard Onesta (EELV), vient d’obtenir la création d’une commission pour remettre à plat la gestion des eaux en Adour-Garonne. "Sivens a joué le rôle de détonateur dans une poudrière en surchauffe depuis des années. C’est le symbole de tout ce qu’il ne faut pas faire, estime Gérard Onesta. Il y a vingt autres barrages en prévision, il est temps de poser le problème." Et en particulier celui du stockage de l’eau pour les 20 000 agriculteurs qui cultivent le maïs.
Pour lire l’article de Libération, cliquer ici
Quelques réflexions
Ce projet de barrage présenté comme bouclé, indispensable, est finalement retoqué au terme d’une expertise indépendante.
On touche là à une question fondamentale concernant la procédure d’enquête d’utilité publique :
les dossiers sont élaborés par le maître d’ouvrage, et c’est souvent le maître d’œuvre (chargé de l’exécution des travaux) qui réalise l’expertise.
les dossiers sont présentés comme complètement bouclés et il n’admettent que des modifications à la marge
Il n’y a pas de recherche de consensus avec les opposants.
C’est bien cette réforme qu’il faut faire d’urgence : faire en sorte que la procédure d’enquête d’utilité publique fasse intervenir des expertises indépendantes, et qu’elle recherche au maximum le consensus et les compromis nécessaires.
Et cela ne prend pas forcément plus de temps que la procédure actuelle qui est très formelle et très lente : il est quand même dommage que pour le barrage de Sivens, il ait fallu un drame pour qu’en quelques mois on parvienne à avancer vers une solution raisonnable, après plusieurs années de procédure classique (et stérile).
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