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Le Conseil d’État et « l’inaction climatique »
dimanche 22 novembre 2020, par - Au fil des jours - Energies - Climat
Ce recours inédit vise « l’inaction climatique » de la France et demande à la plus haute juridiction administrative d’enjoindre au gouvernement de prendre toutes les mesures permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre du pays de manière à respecter ses engagements : atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Il a été déposé en janvier 2019 par la commune Grande-Synthe (et son ancien maire désormais député européen EELV, Damien Carême), exposée notamment à des risques de submersion.
Lors de la séance du Conseil d’État qui a examiné ce recours, le Rapporteur public a déclaré : « Faut-il attendre les échéances de 2030 [− 40 %] et 2050 pour enjoindre au gouvernement d’agir ? Non ». Il a demandé une instruction supplémentaire et donné trois mois au gouvernement pour qu’il produise « tous les éléments permettant de vérifier la cohérence de la trajectoire » de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
A l’époque, Corine Lepage, l’avocate de Grande-Synthe et ancienne ministre de l’environnement a affirmé : « C’est bien la preuve que le rapporteur public n’a pas été convaincu par les éléments apportés jusqu’ici par le gouvernement qui sera bien en peine d’en trouver d’autres ». Pour étayer cette position, il faut préciser que Dans son rapport annuel, publié en juillet, le Haut Conseil pour le climat relève en effet que la France n’est toujours pas sur la bonne trajectoire, jugeant que « les actions climatiques [du pays] ne sont pas à la hauteur des enjeux ni de [ses] objectifs ». Ainsi, les émissions de gaz à effets de serre ont baissé seulement de 0,9 % entre 2018 et 2019, alors que le rythme devrait être d’une diminution annuelle de 1,5 %, et de 3,2 % à partir de 2025 pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
La procédure a pris une dimension supplémentaire avec l’intervention des villes de Paris et Grenoble ainsi que des associations de l’Affaire du siècle, qui se sont jointes au recours. Après avoir lancé cette pétition (plus de 2 millions de signatures en un mois), les ONG Notre affaire à tous, Greenpeace, Oxfam et la Fondation Nicolas Hulot, ont déposé en mars 2019 un recours devant le tribunal administratif de Paris pour « carence fautive » de l’Etat.
Finalement, le Conseil d’Etat a bien suivi le Rapporteur public : un délai de trois mois est fixé au gouvernement pour « justifier que la trajectoire de réduction à horizon 2030 pourra être respectée ».
Les avocats de l’Affaire du siècle estiment qu’il s’agit d’une décision « historique ». « Un pas de géant », a salué l’ancien ministre de l’écologie Nicolas Hulot. « Pour la première fois en France, l’Etat devra alors rendre des comptes sur ses politiques climatiques ». Le Conseil d’État donne trois mois au gouvernement pour prouver qu’il respecte ses engagements climatiques : il devra « justifier que la trajectoire de réduction à horizon 2030 pourra être respectée ».
Par un décret paru en avril, le gouvernement, faute d’être parvenu à respecter ses objectifs pour la période 2015-2018, a relevé les budgets carbone (les plafonds d’émissions) pour la période 2019-2023. Les modifications des budgets carbone « prévoient un décalage de la trajectoire de réduction des émissions qui conduit à reporter l’essentiel de l’effort après 2020, selon une trajectoire qui n’a jamais été atteinte jusqu’ici », note le Conseil d’Etat.
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