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Enquêtes publiques sur l’énergie et le nucléaire
mercredi 7 décembre 2022, par - Au fil des jours - Energies - Climat - Développement Durable
Comme les engagement pris lors des accords de Paris en 2015, les documents stratégiques que sont la Stratégie Nationale Bas Carbone et la Programmation Pluriannuelle de l’Energie n’ont pas du tout été respectés.
Les récentes annonces du gouvernement et du Président de la République devraient être l’occasion de remise à plat de ces documents. Mais il y a peu de chances qu’il en soit ainsi, puisque les annonces sont déjà faites ; en particulier la volonté du gouvernement de lancer rapidement la construction de nouvelles centrales nucléaires (EPR2), avant même d’avoir fixé les objectifs chiffrés, en particulier pour les dégagements de gaz à effet de serre.
Autour de ces questions, une ‘concertation’ est lancée par le gouvernement et un débat public est lancé par la Commission National du Débat Public au sujet de la construction de nouvelles centrales nucléaires, en particulier les deux premières qui sont prévues à Penly.
(Voir en fin d’article les liens pour participer à ce débat).
Les têtes à queue du gouvernement :
Lors du débat sur la PPE (Programmation Pluriannuelle de l’Energie), fin 2018, le gouvernement avait mis en avant la remise à niveau des vieilles centrales nucléaires (le ‘grand carénage’, pour prolonger la durée de fonctionnement au-delà de 40 ans, pour un coût total de plus de 100 milliards €), quitte à fermer quelques trop vieilles centrales (comme Fessenheim), le développement de nouvelles centrales plus puissantes (les ‘EPR2’), et un développement modéré des énergies renouvelables.
Mais il avait refusé d’avancer sur les économies d’énergie (par l’isolation des bâtiments, par exemple), et encore moins sur la sobriété énergétique : tout cela était reporté à plusieurs années plus tard. (note 1)
Aujourd’hui, ce même pouvoir fait de la propagande sur les économies d’électricité, la sobriété, avec des menaces de délestages importants.
Pourquoi ce tête à queue sans prévenir ?
Tout simplement parce que les options avancées par ce PPE ont été complètement mises à mal par les faits :
De nombreuses centrales nucléaires sont à l’arrêt pour révision (prévue à l’avance), mais aussi pour des réparations délicates de fissures dans les soudures.C’est ce même problème qui a entraîné la fermeture de la centrale de Doel en Belgique en 2016. Cela fait sans doute longtemps que ces fissures existent dans les centrales françaises, puisqu’il en était déjà question en 2012. Mais il n’est plus possible de les passer sous silence aujourd’hui. Le résultat, c’est que la moitié du parc français est à l’arrêt depuis plusieurs mois et que cela nous oblige à importer de l’électricité (des centrales au charbon allemandes) et de remettre en route deux centrales à charbon françaises.
Pour compléter ce tableau, cet été, il a fallu, arrêter plusieurs centrales nucléaires à cause de la canicule : comme toute centrale thermique, elle doivent être refroidies en permanence par de l’eau froide pompée sur l’environnement (mer ou fleuve). Mais en pleine chaleur, le rejet de cette eau chaude mettait en danger de nombreuses espèces aquatiques...
Enfin, en marge de toutes les difficultés du chantier de l’EPR de Flamenville, des fissures ont été découvertes dans le couvercle de la future cuve du réacteur. Cela ne retarde pas immédiatement le chantier de construction. Mais il faudra le changer assez rapidement après sa mise en service (à une date encore inconnue). Le forgeage de cette pièce essentielle demande plusieurs années de délai.
Sans parler des piscines qui débordent de combustible usé (et hautement radioactifs, dangereux, et mal propégé)...
Au total, la filière nucléaire s’avère être aussi intermittente que les filières des énergies renouvelables. De plus le délai de sa mise en œuvre est beaucoup plus long (15 ans pour le nucléaire, 3 à 4 ans pour les renouvelables) et son prix est beaucoup plus cher. Selon l’Agence Internationale de l’Energie, le prix de revient au kilowatt-heure (amortissement compris) est à 16,3 cents de $ pour le nucléaire, alors que l’éolien marin est à 8,6, l’éolien terrestre à 4 et le solaire photo-voltaïque à 3,7. Tout ceci sans compter les pénalités (3
milliards €) qu’il a fallu payer à l’État finlandais pour le retard de livraison d’une centrale EPR, et celles qu’il faudra payer pour les retards des 2 centrales anglaises...C’est, bien entendu l’État français (nous) qui a payé l’addition...
C’est donc bien la PPE dans sa logique qui est en échec : la pertinence des orientations choisies sont invalidées par la réalité.
Une ‘nouvelle’ PPE ?
Face à cette situation catastrophique, le gouvernement semble inverser la vapeur :
Il abandonne son refrain traditionnel sur « l’électricité abondante et pas chère grâce au nucléaire », et il en appelle maintenant à la sobriété énergétique des français et évoque de possibles coupures de courant pendant l’hiver… tout en oubliant de mettre le paquet financier sur l’isolation thermique des habitations et des locaux d’activités (sans doute en raison du coût financier d’une telle campagne) ;
il semble décidé à favoriser la rapidité de traitement administratif des autorisations des projets éoliens et photovoltaïques (pour essayer de combler le retard de la France dans ce domaine, alors que l’Europe menace de prendre des sanctions financières) ;
et… il propose de construire 6 nouvelles centrales EPR2 !! (pour dans 15 ans ?) ;
Mais Il oublie de préciser que près de la moitié de l’uranium utilisé dans les centrales françaises vient du Kazakhstan par l’intermédiaire de la société russe Rosatom ; qui elle même procède au retraitement d’une partie du combustible usé des centrales françaises (qui déborde de partout !). Il oublie également de préciser qu’une partie du gazole vendu en France est importé de Russie… Qui parle d’indépendance énergétique, ou même de sanction et d’embargo sur les importations russes ???
Mais au total, ces mauvaises orientations ont des conséquences financières alarmantes : EDF croule sous plusieurs dizaines de milliards € et est dans l’incapacité de financer ce nouveau programme EPR2, ni même d’investir dans les énergies renouvelables.
La solution ? Re-nationaliser EDF et faire assumer par l’État l’énorme trou financier qui résulte de l’ancienne PPE, ainsi que l’énorme trou financier qui va résulter de la fuite en avant pronucléaire de la nouvelle PPE.
Le débat public :
Il est divisé en deux parties :
Le gouvernement a lancé une concertation pour permettre au grand public de s’exprimer sur l’avenir du bouquet énergétique du pays (la PPE), alors que la France s’apprête à lancer un vaste nouveau programme nucléaire.
Pour participer à la concertation, cliquer ici
Attention ! Cette enquête "publique" prend fin le 31 janvier 2022 !!
Par ailleurs, le Conseil National du Débat Public, présidé par Chantal Jouanneau, a décidé de lancer un débat public sur la construction de nouvelles centrales nucléaires, en particulier les deux premières qui doivent être construites sur le site de Penly, en Normandie. Ce débat public est prévu de se dérouler jusqu’en février 2023.
Sur le site du CNDP, on peut avoir le calendrier des réunions publiques qui se tiennent et visionner les vidéo de celles qui ont déjà eu lieu : lien =
On peur aussi participer au débat en ligne et donner son avis en cliquant ici
Note 1 : voir l’article sur la PPE précédente en cliquant ici
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