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Un enjeux fondamental des élections européennes
Accord de libre-échange USA-Europe : des négociations quasi clandestines
lundi 5 mai 2014, par - Au fil des jours - Campagnes2014 - Développement Durable
Des négociations très "discrètes" ont lieu depuis un certain temps entre les Etats Unis et la Commission européenne. Quelle est leur portée ?
Toutes les activités économiques sont concernées. L’accord porte sur l’élimination des droits de douanes, qui sont aujourd’hui en moyenne de 4% entre les deux continents. Et surtout sur l’élimination des "obstacles non tarifaires", des règles et réglementations jugées superflues : différences de règlements techniques, normes, procédures d’approbation, qu’il s’agit d’harmoniser.
Deux milliards d’euros de biens et de services sont échangés chaque jour entre les deux continents. Les droits de douane sont déjà̀ très modérés. Le véritable enjeu est bien la convergence des réglementations, et des normes sociales, environnementales et sanitaires.
Pourquoi cette opacité de la part de la commission européenne ?
"Pour réussir des négociations commerciales, il faut respecter un certain degré de confidentialité", explique tranquillement la Commission. Elle s’engage cependant à "tenir informés du cours des événements" les États membres et le Parlement européen. Informer les citoyens de l’avancée des négociations ne semble donc pas une priorité !
Quel est le principal danger d’un tel accord ?
Les critiques se focalisent sur un point sensible des négociations : les mécanismes de protection des investissements, qui devront être inclus dans l’accord, d’après le mandat accordé aux négociateurs : les multinationales pourront-elles contester les législations sociales ou environnementales ?
Ce projet "combine en les aggravant les éléments les plus néfastes des accords conclus par le passé, analyse Lori M. Wallach, responsable de l’ONG états-unienne Public Citizen. S’il devait entrer en vigueur, les privilèges des multinationales prendraient force de loi et lieraient pour de bon les mains des gouvernants."
Concrètement, les investisseurs pourraient avoir la possibilité de porter plainte contre un État s’ils considèrent que les évolutions de la législation les pénalisent.
Une nouvelle législation du travail trop "contraignante" ? Des règlementations environnementales qui mettent en péril les profits d’une multinationale installée en France ? Les entreprises pourront demain arguer qu’elles sont lésées et réclamer des dommages et intérêts, devant un tribunal ad hoc.
La Commission européenne veut avant tout protéger les "investisseurs" contre les risques "d’être expropriés par leur État d’accueil (en cas de nationalisation, notamment) ou de voir leurs investissements réduits à néant par l’adoption de lois nationales". D’où la nécessité d’un recours possible. Une idée qui n’est pas sans rappeler le projet d’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), négocié entre 1995 et 1997 par les États de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
Pour plus de détails sur cette négociation, lire l’article de « BastaMag » en cliquant ici
Les têtes de liste EELV dénoncent ce projet :
Dans une déclaration signée des 8 têtes de liste aux élections européennes, EELV :
"Ce que la Commission européenne négocie en notre nom – mais sans que nous puissions obtenir le moindre élément de contenu – ce sont les règles, les normes, les droits qui encadrent nos économies et nos sociétés. Santé, environnement, droits des salariés, données personnelles, services publics, agriculture et alimentation… tout est négociable !"
"Pour l’administration américaine, le rêve est de remplir nos assiettes d’OGM, bœuf aux hormones et volaille chlorée. Pour les dirigeants européens, c’est conquérir les marchés de l’eau totalement privatisés ainsi que les services financiers, et importer le gaz de schiste américain."
"Au nom du soutien aux investissements, l’accord de libre-échange transatlantique instaure de fait une nouvelle juridiction supranationale qui contourne les juridictions nationales. Toute entreprise pourra y contester la décision d’une collectivité locale, d’un État ou de l’Union européenne si elle considère qu’elle remet en cause ses bénéfices, et réclamer des centaines de millions d’euros de dédommagement. Toute défense ou conquête de choix démocratiques, dans les domaines du droit du travail, de l’éducation, de l’environnement, des services publics ou de la finance sera dès lors conditionnée au bon vouloir des multinationales."
"Ce procédé juridique apparu par le biais d’accords bilatéraux de commerce ces dernières années fait déjà des ravages ailleurs :
Sur la santé : le géant américain du tabac Philip Morris a profité de ce dispositif contenu dans un accord entre l’Australie et Hong-Kong pour attaquer, via sa filiale hong-kongaise, la politique australienne de lutte contre le tabagisme et demander des milliards d’indemnités.
Sur la protection de l’environnement : Lone Pine, société américaine, réclame 250 millions de dollars de dédommagement au gouvernement du Québec. Son crime : avoir décidé d’un moratoire sur l’exploitation des gaz de schiste.
Sur la transition énergétique : Vattenfall exige de l’Allemagne 3,7 milliards d’euros en compensation de la sortie du nucléaire décidée en 2012 par le gouvernement Merkel. Si cet accord était déjà en vigueur, des fabricants de biberons pourraient poursuivre la France pour son interdiction du bisphénol A !
Une arme de destruction massive contre la démocratie."
Pour lire la déclaration complète, cliquer ici
Ce projet d’accord est, à l’évidence un des grands enjeux de ces élections européennes.
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