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Projet de loi immigration : fortes craintes

vendredi 12 janvier 2018, par Patrick Cotrel - -

Aussi surprenant que cela puisse paraitre, Benoît Hamon et Christian Estrosi ont la même analyse de ce projet de loi, même si leur appréciation est opposée : "le gouvernement mène la politique la plus dure en matière d’immigration depuis Nicolas Sarkozy.
Du côté des associations intervenant sur les domaines sanitaire et social, qui ont été reçues par le Premier ministre lundi (certaines comme Médecins du monde ont boycotté cette réunion), c’est la déception. Selon Le Monde et Europe 1, ce projet présente "un durcissement très net" avec "une insistance" sur les mesures visant "à reconduire les migrants en situation irrégulière", a déclaré Louis Gallois, président de la Fédération des acteurs de la solidarité. Il a ajouté, au nom de la trentaine d’associations reçues, souhaiter "que la concertation se continue".
"Aucune volonté" du gouvernement "d’infléchir" le texte. "Il y a eu un échange, une expression mais aucune volonté d’infléchir" le texte ni "de tenir compte des propositions de la société civile", a déploré Thierry Kuhn, président d’Emmaüs France. "On a été écoutés, mais on a l’impression que lâcher quelque chose de la part du gouvernement semble impensable", a affirmé Patrick Doutreligne, président de l’Uniopss (Union nationale d’associations sanitaires et sociales). Evoquant le sort des migrants "ni expulsables ni régularisables" et qui restent pendant des années dans les limbes administratifs, M. Doutreligne a appelé "soit à changer la loi, soit à faire preuve d’un peu de pragmatisme pour les insérer".
Plusieurs associations ont saisi le Conseil d’Etat pour obtenir la suspension d’une circulaire contestée organisant le recensement des migrants dans l’hébergement d’urgence.
Le contenu du projet de loi :
Selon Le Monde, le projet de loi ‘asile-immigration’ inscrit la politique française dans une dissuasion migratoire systématique.
D’abord, le texte instaure une véritable course contre la montre pour le demandeur d’asile. Alors qu’il disposait jusqu’à présent de 120 jours pour déposer son dossier, désormais il n’aura plus que 90 jours pour le faire. De plus, un demandeur débouté par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) ne disposera ensuite que de deux semaines, au lieu d’un mois, pour déposer son recours. Deux points délicats, sachant qu’il faut aujourd’hui environ 30 jours ouvrés pour accéder à un rendez-vous en préfecture. Responsable du droit des étrangers au Secours catholique, Laurent Giovannoni regrette que rien ne soit proposé dans le texte pour réduire cette attente qui se passe sur les trottoirs. "On nous dit qu’on veut réduire les délais de la demande d’asile et on ne propose rien dans un projet de loi pour organiser mieux l’accueil dans les préfectures !", s’insurge-t-il.
Côté privation de liberté, les observateurs doutent aussi que la ligne choisie permette vraiment de multiplier les renvois. La durée maximale des séjours en rétention administrative va passer de 45 à 90 jours, et même à 115 jours. Depuis que ce doublement a été évoqué, les associations présentes dans les centres de rétention ont à maintes reprises rappelé que les deux tiers des expulsions ont lieu dans les douze premiers jours d’enfermement, mais cela n’a rien changé. "On voit bien qu’il s’agit de donner un signal plus que d’être efficace. Le gouvernement veut avant tout dissuader les migrants de venir en France", analyse Serge Slama, professeur de droit public à l’université Grenoble-Alpes.
Pour compléter ce tableau, la chasse aux sans-papiers sera elle aussi simplifiée puisque la retenue administrative pour vérification du droit au séjour sera augmentée de 16 à 24 heures et les "pouvoirs d’investigation" des policiers seront renforcés.
Immigration politique et économique :
La justification de ce projet de loi repose sur la distinction entre immigration politique (droit d’asile) et immigration économique. Cela renvoie à une vision selon laquelle il est impératif d’accueillir celles et ceux qui sont en butte à la répression politique ou religieuse, la torture, l’extermination, … A l’inverse, l’immigration économique serait constitué de personnes qui font le choix de rechercher une place dans nos sociétés ayant un meilleur niveau de vie et de protection sociale.
Cela ne tient pas compte du changement de la situation au niveau mondial. Le dérèglement climatique frappe principalement les pays les plus pauvres : la désertification gagne du terrain au sahel, les épisodes cycloniques se multiplient en Asie, … Et cela aiguise les conflits inter ethniques, les luttes et les guerres pour le contrôle de la ressource en eau, pour les terres cultivables, pour le contrôle des matières premières.
En même temps, on sait que ces dérèglements climatiques sont l’effet de l’augmentation des Gaz à Effet de Serre (GES) que NOUS (les pays riches) avons émis il y a plusieurs décennies.
Qu’est-ce que nos pays peuvent faire ?
- Au moins stabiliser, et si possible réduire, nos émissions de GES. Mais ce n’est pas bien parti, puisque nos pays continuent à augmenter leurs émissions. Au rythme actuel, le réchauffement en fin de siècle devrait atteindre +4°C (au lieu des +2°C estimés comme encore supportables à la limite)
- Et même si nous parvenons à stabiliser assez rapidement nos émissions pour rester à +2°C en fin de siècle, les dérèglements vont continuer à augmenter, et les phénomènes évoqués ci-dessus à prendre de l’ampleur.
- Aider les pays pauvres à se développer et à lutter contre le dérèglement. Sur cette question, Jean Jouzel (spécialiste du climat) et Pierre Larrouturou (économiste) viennent de publier un livre où ils estiment qu’il faut (et qu’il est possible) de dégager 1000 milliard $ pour cela. Mais les conférences qui ont suivi la COP 21 ne parviennent même pas à dégager les 100 milliards $ promis !
- Alors, au moins, préparons-nous à accueillir les réfugiés politiques et climatiques dont le nombre ne va pas manquer de croitre, vue notre incapacité à faire autre chose. Et si nous parvenons à les accueillir correctement et à les intégrer, ils peuvent aussi constituer une chance pour nos sociétés vieillissantes, par la vitalité qu’ils amènent.
Et ne nous laissons pas ébranler par les discours de haine et de division : aussi hauts soient-ils, les murs de barbelés ne parviendront jamais à nous protéger de la misère et de la faim.
La terre est un seul et même écosystème !

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