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Panne d’électricité en France en 2030 ?

mercredi 19 avril 2023, par Patrick Cotrel - -

La situation de la production d’électricité en France en 2022 est alarmante. Pour la première fois depuis plusieurs années, la production électrique a baissé (522,4 TWh en 2021 pour 445,2 TWh en 2022) et il a fallu en importer.
Pourquoi cette situation ?
- Les centrales nucléaires ont été beaucoup plus arrêtées (baisse de 82 TWh de 2021 à 2022), du fait de l’âge de ces centrales (40 à 50 ans, alors qu’elles on été conçues pour 40 ans) et des fissures qui ont été découvertes dans certaines soudures, impliquant des arrêts non prévus. De plus, le manque d’eau (indispensable pour refroidir les chaudières nucléaires) a commencé à se faire sentir, et l’hydroélectricité a moins produit.
- La France est en retard sur les exigences de l’Union Européenne pour la mise en, service de moyens de production l’électricité renouvelable. Ce déficit du nucléaire n’a donc pas été compensé comme il aurait pu l’être.
- L’embargo appliqué à la Russie a mis la France en difficulté (mais d’autres pays européens sont dans le même cas) pour sa dépendance vis à vis du gaz russe, mais aussi des produits pétroliers (ex. pour le gazole). Mais en plus la France dépend de la Russie pour l’approvisionnement de ses centrale nucléaires en uranium (pour 40%), mais aussi pour le retraitement des combustibles usés (les piscines contenant cet uranium usé débordent).
- Enfin, les prévisions du GIEC indiquent que le réchauffement climatique va plus vite que prévu : un accroissement moyen général de 1,5°C n’est plus prévu en 2050, mais dès 2030 ! C’est donc dès 2030 qu’il faut viser la neutralité carbone, ce qui demande d’accélérer la transition énergétique.

C’est pour souligner cette situation alarmante que Ouest-France (du 7 avril) consacrait une page entière à ce « (...) manque d’électricité en 2035  » et que « Alternatives économiques » d’avril 2023 faisait apparaître un « parc nucléaire défaillant » (54 % de disponibilité en 2022) et « un besoin d’investissement massif pour l’éolien et le photovoltaïque ».

Alors, Quelles solutions ?

Les perspectives énoncées par Emmanuel Macron sont grossièrement trompeuses : prévoir la conception et la réalisation de 6 centrales nucléaires d’une nouvelle génération (EPR2) demande au minimum 15 ans , ...soit en 2038 !
La malheureuse expérience de Flamanville nous le démontre : 11 ans de retard par rapport à la date de livraison initiale, et elle ne fonctionne toujours pas. Sans parler du gouffre financier que cela induit (le prix initialement prévu pour l’EPR a été multiplié par plus de 4 !) et la fragilité des centrales nucléaires par rapport au manque d’eau
Dans cette situation, il ne restent que deux leviers (liés entre eux) sur lesquels pouvoir agir :
- développer la sobriété énergétique, en particulier dans les deux domaines les plus émetteurs de gaz carbonique : les bâtiments et les déplacements. Pour les bâtiments, le retour sur investissement est long. Cela suppose donc de mettre en place des aides étatiques conséquentes, mais cependant exigeantes quant au résultat attendu. Pour les déplacements, le développement rapide des transports en commun du quotidien doit être un impératif, ainsi que des formes de co-voiturage pour les zones moins denses. Cela passe aussi par le développement de voitures électriques, et aussi par la mise sur le marché de véhicules plus légers et comportant moins de dispositifs électroniques sophistiqués qui alourdissent les véhicules particuliers.
Enfin, il faut encourager les recherches et développements de technologies industrielles moins gourmandes en énergies carbonées (fabrications des ciments, aciers, …).
- on le devine facilement, ces transformations induisent des substitutions d’utilisation d’énergies fossiles par l’électricité. Par conséquent, la production d’électricité va devenir de plus en plus vitale.
Remarque : Les énergies renouvelables produisent directement (= sans perte) de l’électricité (photovoltaïque) ou par l’intermédiaire de l’énergie mécanique (éoliennes). Alors que les énergies fossile (dont le nucléaire) produisent de la chaleur, qui est transformée en énergie mécanique(turbines), avec beaucoup de pertes (tours de refroidissement), puis en électricité (alternateurs). Ainsi, un moteur thermique (automobile, par exemple), perd près de la moitié de l’énergie produite en chaleur qu’il faut évacuer (radiateurs, dispositifs de refroidissement).
- ce sont donc les dispositifs des énergies renouvelables qu’il faut développer massivement et en urgence, car ils sont plus efficaces, moins coûteux et plus rapide à construire. La France enregistre un retard de 50 % à 80 % par rapport à ce qu’ont fait l’Angleterre et l’Allemagne pour les éoliennes...

Dans son étude publiée en octobre 2021, RTE (Réseaux de Transport d’Electricité = société publique dépendant d’EDF à 51,5%) a présenté 6 scénarios allant de 100 % d’énergies renouvelables, avec déclassement accéléré des centrales nucléaires à 50 % d’énergies renouvelables et 50 % d’énergie nucléaire (anciennes et nouvelles centrales).
Pour lire l’article publié à ce sujet sur ce blog, cliquer ici.
Bien entendu, dans ce rapport, la culture traditionnelle pro-nucléaire en vogue chez EDF s’est fait sentir : on insiste beaucoup sur l’intermittence des énergies renouvelables et on ignore le coût du nucléaire, sa dépendance à la Russie et sa fragilité technique (qui s’est montrée en 2022).
Et pourtant il insiste sur l’importance et l’urgence à développer rapidement les énergies renouvelables.

Le message a-t-il été entendu par le gouvernement ?
Pas du tout, puisqu’à l’été 2022, en pleine augmentation des prix des énergies, le gouvernement a repoussé l’idée de surtaxer les superprofits réalisés par les pétroliers, gaziers, exploitants d’autoroutes. Mais il a appliqué cette idée … aux exploitant d’éoliennes et parcs solaire. L’État a ainsi récupéré une trentaine de milliards € pour 2022 et 2023. (D’après la Commission de Régulation de l’Energie, cité par Cédric Philibert dans son article dans la revue « L’Economlie politique » N°97 de février 2023).

Par son aveuglement pro-nucléaire et son incapacité à tenir compte des réalités, Emmanuel Macron et son gouvernement nous conduisent tout droit à une impasse énergétique et financière.

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