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Droit du travail

Les français sont-ils trop protégés ?

(d’après un dossier publié par "Alternatives économiques")

lundi 13 avril 2015, par Patrick Cotrel - -

Dans la période actuelle, on entend beaucoup parler de la "rigidité" du marché du travail, du poids des 35 heures sur l’économie, de refus d’embaucher de peur de ne pas pouvoir licencier, d’un code du travail trop compliqué, de surprotection des salariés et des chômeurs, …
Pierre Gattaz et le MEDEF, bien entendu, nous servent ce discours en boucle, mais le gouvernement parle aussi de réforme du contrat de travail et d’abandon des 35 heures, au nom de la simplification… puis fait marche arrière devant l’opposition des syndicats.
Qu’en est-il exactement ?
Se séparer d’un salarié est-t-il trop difficile ?
En fait, le CDI est très peu contraignant dans les toutes premières années (prime de licenciement très faible) ; beaucoup moins que dans d’autres pays (Allemagne, Italie, Belgique, Mexique,…). Par contre, avec l’ancienneté, il devient plus difficile à rompre. Mais les "ruptures conventionnelles" sont là pour mettre fin rapidement à un CDI : 333 600 ont été signés pour la seule année 2014.

Le CDD est de plus en plus utilisé comme période d’essai prolongée : ils représentent 85% des 23 millions d’embauches qui se font chaque année. Par contre, le CDD est rigide sur un seul point : sa durée. Mais les renouvellements de contrats de longueur variable peuvent être faits 2 fois, sur une période qui peut couvrir plusieurs années.
Si on ajoute à cela les autoentrepreneurs (plus de 900 000) et l’intérim (presque 600 000), on a une palette de contrats qui peuvent s’adapter à toutes les situations. D’autant que la loi Macron vient d’ouvrir la possibilité de contourner les prud’hommes et que le plan social d’une entreprise en difficulté n’est plus évalué qu’en fonction de l’entreprise elle-même, et non plus du groupe auquel elle appartient.
Et dans les faits, on constate que le « turn over » (taux de rotation) a très fortement augmenté dans les entreprises.
Les français travaillent-t-ils trop peu ?
En fait, les souplesses dans l’application des 35 heures n’ont cessé de se multiplier, avec l’annualisation du comptage. En réalité, la moyenne du temps de travail effectif des salariés à temps plein est de …39 heures, comme le montre le tableau ci-contre. De plus, si on comptabilise les temps partiels, le temps de travail total en France est dans la moyenne des autres pays européens.
Les salaires français sont-ils trop rigides ?
Les comparaisons avec d’autres pays non européens tient avant tout à la parité de l’€uro (qui est en train de se rééquilibrer). Par contre, en 2012, le salaire français est inférieur de 15% au salaire allemand et de 25% au salaire suédois.
Même si les salaires français n’ont pas baissé malgré la crise (mais le nombre de chômeurs, lui a fortement augmenté), cela a permis que le niveau de consommation ne s’effondre pas complètement, amplifiant l’effet de la crise. De plus, les systèmes d’intéressement et de participation des salariés touchent 35% des entreprises (14% en Europe). Cela donne une souplesse des salaires plus importante que la moyenne européenne.
Les chômeurs sont-ils trop assistés ?
On nous parle souvent de 400 000 offres d’emplois vacantes qui ne trouvent pas preneurs (sous-entendu, les chômeurs ne sont pas pressés de travailler). Mais on peut comptabiliser les offres annulées et la raison de leur annulation : offre pourvue en interne, candidature spontanée ou par connaissance, changement d’avis de l’employeur, …Au total de l’année il ne reste plus que 34 000 offres annulées faute de candidats.
Le contrôle de la demande d’emploi existe et on compte de l’ordre de 45 000 radiations par mois (surtout pour non réponse à convocation). De plus il y a des contrôles anti-fraude.
L’indemnisation est ouverte à partir de 4 mois de travail, ce qui est plus avantageux que dans beaucoup d’autres pays. Mais la durée d’indemnisation est proportionnelle au temps travaillé et elle est souvent très courte. Ainsi, la moitié des chômeurs de cat A, B et C ne touchent aucune indemnité (ni assurance chômage, ni régime de solidarité). Quant aux chômeurs bénéficiant d’une formation professionnelle, leur nombre n’augmente pas. On est bien loin de la flexisécurité à la danoise !
Conclusion :
Les maux principaux de l’économie française ne sont certainement pas à chercher de ce côté. Le retard de compétitivité, s’il existe, est plutôt du aux retards d’investissement pour moderniser l’appareil productif et dans l’emprise d’une sphère financière (particulièrement développée en France) qui préfère les opérations spéculatives aux aides aux investissements des entreprises.

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