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Investir dans les énergies de demain (déjà disponibles aujourd’hui)
samedi 5 juin 2021, par - Au fil des jours - Energies - Climat - Développement Durable
Au cours des deux siècles passés, l’utilisation du charbon, du pétrole et du gaz naturel ont permis le développement rapide de nouvelles technologies mécaniques. Tout cela a donc été assimilé au « progrès ».
Mais ce développement extraordinaire de l’utilisation de ces énergies fossiles a des conséquences très lourdes de menace pour le climat sur la terre : c’est la vie sur terre qui est menacée.
L’Agence Internationale de l’Energie (AIE) suit de près l’évolution des utilisations des différentes formes d’énergie. Cédric Philibert fait le point sur cette évolution, dans un article publié par le revue trimestrielle « l’économie politique » de mai 2021.
Cédric Philibert est consultant indépendant et analyste senior des questions d’énergie et de climat.
Solaire et éolien, les énergies en pointe :
« Le fait majeur de la décennie écoulée, c’est que l’énergie solaire photovoltaïque (PV) est devenue la moins chère de toutes les énergies. Et l’éolien terrestre ou maritime a vu, lui aussi, son coût chuter considérablement. »
Le graphique ci-dessous montre cette évolution des coûts de l’électricité (amortissement + fonctionnement) pour les installations nouvelles entre 2009 et 2020.
« Aux USA, lorsqu’il s’agit de construire une installation nouvelle de puissance électrique pour les pointes de consommation, le photovoltaïque accompagné de batteries, dont le coût chute rapidement, entre en compétition avec les centrales à gaz les plus récentes. »
L’entêtement français pour le nucléaire :
Une bonne partie du parc nucléaire français arrive au terme de la durée d’activité initialement prévue (40 ans). Pour prolonger leur fonctionnement de 10 ans, il faut les rénover complètement. Mais le coût de rénovation (le « grand carénage ») est estimé à 100 milliards € par la cour des comptes !
Dans ces conditions nouvelles, est-il raisonnable de faire ce choix, plutôt que d’investir dans les énergies renouvelables, sans émissions de gaz à effet de serre, beaucoup moins dangereuses que le nucléaire (Tchernobyl, Fukushima) et sans production de déchets hautement dangereux pour des milliers d’années, dont on ne sait que faire ?
Quant au projet de construire 6 nouvelles centrales de type EPR énoncé par EDF (avec une approbation implicite du gouvernement), il nous mène directement vers une impasse financière et technologique. En effet, l’EPR de Flamanville accuse un retard de plus de 10 ans et un coût multiplié par 5 ou 6 (20 milliards € pour le moment). EDF accuse un endettement de 34 milliards €...
Les énergies intermittentes :
Le soleil n’éclaire pas la nuit et le vent ne souffle pas toujours. Il est donc difficile d’ajuster la production d’électricité aux pointes de consommation.
Les énergies les plus souples sont l’électricité hydro-électrique (neutre en CO2), et le gaz : on peut mettre en route la production d’électricité dans un délai court. Ce n’est pas le cas des centrales nucléaires : les procédures de démarrage sont longues et il est difficile de moduler leur régime de marche.
De plus la souplesse d’utilisation n’est pas le seul critère qui induit des contraintes. L’efficacité énergétique (le « rendement ») doit aussi être prise en compte. Par exemple,
la production d’électricité à partir de production de chaleur (centrales à combustibles fossiles ou nucléaire) ont un niveau d’efficacité d’environ 40 %. Il y a donc une perte de chaleur de 60 % qui doit être éliminée. C’est pourquoi les centrales nucléaires sont implantées près de la mer ou de fleuves pour assurer ce refroidissement (qui peut poser problème en cas de forte chaleur). A l’inverse, les panneaux photo voltaïques et les éoliennes ont une efficacité proche de 100 % pour produire de l’électricité.
Par exemple pour le chauffage, une chaudière gaz à condensation a une (bonne) efficacité de l’ordre 85 %. Mais une pompe à chaleur a une efficacité de 340 %.
Autre exemple : pour les véhicules, un moteur thermique accuse une efficacité de 25 à 40 %, alors qu’un moteur électrique a une efficacité de l’ordre de 80 %...
On le voit, la qualité du mix énergétique et le choix de l’énergie et des technologies associées (dont le stockage), pour répondre à chacun des besoins spécifiques, sont essentiels. Bien plus que de choisir une seule source/technologie, comme le gouvernement français le fait avec le nucléaire.
L’hydrogène :
L’hydrogène fait beaucoup rêver certains responsables politiques ; sans doute parce que cela pourrait être présenté comme la solution miracle pour ne rien changer aux habitudes d’utilisation de la voiture : un véhicule propre, qui n’émet que de l’eau et qui permet une autonomie comparable à l’essence…
Mais, il y a un MAIS : le rendement, et donc le coût ! En effet le cycle complet est complexe : Production d’électricité (solaire ou photovoltaïque) – qui par électrolyse produit de l’hydrogène (l’hydrogène n’existe pas à l’état libre dans la nature). Compression de l’hydrogène, puis distribution dans des stations services, puis chargement dans les véhicules. Enfin, dans le véhicule, passage de l’hydrogène dans une pile pour produire de l’électricité, qui alimente un moteur électrique.
On le comprend aisément : il y a beaucoup de pertes d’énergie à chacune de ces étapes. Et cela fait de l ‘hydrogène un moyen coûteux de stockage de l’énergie ;
Etant donnée la baisse importante du coût des batteries pour stocker directement l’électricité, l’hydrogène ne subsistera que comme solution de niche, quand le rayon d’autonomie ou le poids des véhicules est primordial.
La sobriété :
On l’aura compris, l’AIE est maintenant convaincue (et presque militante), qu’il faut éliminer les énergies fossiles d’ici 2050. En même temps, il s’agit bien d’une transition qui demande du temps, des moyens financiers et techniques et du temps d’adaptation de l’appareil de production.
L’AIE a pris conscience qu’il faut aussi convaincre la majorité des citoyen-ne-s de la nécessité d’une certaine sobriété dans notre mode de vie.
Cela permettra, aussi, de lutter contre la diffusion d’informations en grande partie fausses. Par exemple des publications qui montrent les « terres rares » là où il n’y en a pas (dans l’écrasante majorité des panneaux solaires et dans la majorité des éoliennes), mais pas là où il y en a (dans les raffineries, dans les pots catalytiques des voitures à essence…). Le tout en oubliant que l’empreinte carbone de ces énergies renouvelable est 10 à 100 fois inférieure à celle des énergies fossiles.
Enfin, pour conclure, il ne faut pas croire que cette bataille pour la neutralité carbone résoudra tous nos problèmes d’environnement. Il faudra encore prévenir et lutter contre les effets, déjà à l’œuvre, du dérèglement climatique. Et il faudra aussi lutter contre les nombreuses pollutions de tous ordres qui portent une grave atteinte à la biodiversité...
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