Accueil > Blog > Conclusions du « Grand débat », selon Macron
Conclusions du « Grand débat », selon Macron
dimanche 5 mai 2019, par - Au fil des jours - Européenne 2019 - Développement Durable
Environnement, climat :
Ce thème était complètement absent du discours initialement prévu (selon les fuites) et reporté en raison de l’incendie de ND de Paris.
Cette fois-ci, le Président a quand même évoqué cette question, très présente lors des débats et qui donne lieu à des mobilisations importantes (pétition « l’affaire du siècle’, manifestations des jeunes pour le climat, …).
Mais les objectifs de la Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPI) n’ont pas changé, alors qu’ils sont notoirement insuffisants pour respecter les engagements pris par la France lors de la COP 21 (par exemple, nos dégagements de gaz à effet de serre continuent d’augmenter). La plus grosse insuffisance de cette PPI, c’est l’absence d’objectifs et de moyens financiers pour l’isolation des logements (la meilleure énergie, c’est celle qu’on ne consomme pas !). C’est l’un des principaux points qui a motivé le départ de Nicolas Hulot.
Une autre insuffisance concerne les éoliennes offshores et les énergies marines renouvelables, pour lesquelles notre retard devient angoissant pour les entreprises prêtes à produire, mais qui restent désespérément l’arme aux pieds, faute de volonté et d’argent pour débloquer la production. Pour mémoire, la capacité totale de l’Europe en éolien offshore est de 18 499 MégaWatt … dont 2 pour la France !!!
Le président a mis en avant la création prochaine d’un ‘jury citoyen’ pour réfléchir à la transition écologique et faire des propositions dans 6 mois (au moins). Mais ce ne sont pourtant pas les propositions qui manquent : de nombreuses associations et groupes de spécialistes en ont produit depuis longtemps, y compris en regard des engagements de la France. Ce ne sont pas les propositions qui manquent, mais la fixation d’objectifs politiques et l’allocation des moyens financiers correspondants. L’intervention de François de Rugy dans Ouest-France du 2 mai n’apporte aucun élément nouveau sur ce sujet.
Se contenter de mettre en place de nouvelles structures de débat revient en fait à gagner du temps, c’est-à-dire à perdre un temps précieux face au danger du réchauffement de plus en plus pressant, comme l’indique le GIEC !
La justice fiscale :
La grande revendication entendue tout au long du grand débat, c’est la demande de justice fiscale ; c’est à dire plus d’impôts pour les plus riches et les grandes entreprises, et une. Transition écologique socialement plus équitable.
Mais le président Macron traduit cela comme une demande de baisse générale des impôts directs ; qui doit engendrer mécaniquement quelques ressources supplémentaires (repousser dans les faits l’âge de la retraite, suppression de quelques niches fiscales des entreprises, sans préciser lesquelles) et des baisses dans les dépenses de l’Etat, qui se traduiront inévitablement par un engagement trop faible dans la transition écologique et moins de services publics.
Pourtant, une série de propositions avaient émergée, mais :
Baisser les énormes avantages accordés aux entreprises (Cice, Crédit impôt-recherche, ..) qui créent très peu d’emplois -> c’est non ;
rétablir l’ISF -> c’est non ;
créer une tranche supplémentaire pour les hauts revenus -> c’est oublié ;
baisser les impôts indirects qui frappent indistinctement tous les citoyens (TVA, …) -> c’est oublié.
En réalité, si on voulait introduire plus de justice fiscale, il faudrait baisser les impôts les plus injustes (comme la TVA et les impôts indirects), mais surtout pas baisser les impôts directs qui sont beaucoup plus progressifs et plus justes.
En réalité, l’objectif de l’exécutif pour faire baisser le mécontentement exprimé par le mouvement des Gilets jaunes, c’est de baisser l’impôt direct pour les classes moyennes les plus modestes, en bricolant les tranches d’imposition les plus basses, et de baisser l’impôt sur les sociétés !
Les autres sujets abordés :
La démocratie : refus de reconnaître le vote blanc et le vote obligatoire, refus de reconnaître le RIC (référendum d’initiative citoyenne), mais abaissement à 1 million le nombre de signatures pour déclencher un référendum d’initiative partagée (pourquoi pas)… Les propositions du Président se résument à introduire la proportionnelle pour 20% des députés, dont le nombre sera réduit de 20 à 30%, et remplacer le Conseil économique, social et environnemental (CESE) par des jurys citoyens. Le problème, c’est que des instances qui émettent des avis intéressants existent déjà (comme le CESE ou le Conseil national de la transition écologique, …), mais qui ne sont jamais pris en compte par l’exécutif !
La réforme de l’Etat :
- La décentralisation : Depuis le début de son mandat, le président a re-centralisé de nombreux domaines. Et on a l’impression qu’il souhaite surtout déconcentrer les services de l’Etat pour une plus grande présence dans les territoires…
- Création d’un lieu (France services) polyvalent dans chaque canton. Mais la récente réforme des cantons a fortement augmenté leur superficie, ce qui fait qu’en zone peu peuplée, un seul lieu par canton ne peut être proche de tous.
- Suppression de l’ENA : Si on fait le diagnostic que la haute fonction publique est entremêlée avec la caste des hauts dirigeants du privé (par le pantouflage, comme l’a fait Emmanuel Macron) et ne servent plus vraiment les intérêts de tous les citoyennes et citoyens, en quoi la seule suppression de l’ENA va solutionner cette grave question ?
- Les retraites : Alors que le système est durablement équilibré, pourquoi vouloir obtenir dans les faits un recul de l’âge effectif de départ en retraite ? Alors qu’on sait que cela va avoir pour conséquence d’augmenter le nombre de chômeurs âgés, puisque les entreprises les considèrent comme trop chers et pas assez performants.
On s’y attendait…
L’exécutif et sa majorité, Président en tête, a mené le Grand débat comme une campagne électorale. Dans ces conditions, le Président estime que la crise des Gilets jaunes n’est pas une remise en cause de ses grandes orientations politiques, mais traduit une demande d’aller plus vite pour mener ses réformes dans le même sens, avec les mêmes objectifs, moyennant quelques inflexions.
On s’y attendait…
Derniers commentaires