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Accueil des migrants de l’Aquarius : ‘Fierté’ de l’Europe ?

lundi 20 août 2018, par Patrick Cotrel - - -

Rappel de l’épilogue : Après cinq jours en mer, les 141 migrants sauvés au large des côtes libyennes par l’équipage de l’Aquarius sont arrivés au port maltais de La Valette. La France va accueillir 60 personnes, parmi les migrants de l’Aquarius et 114 autres arrivés lundi à bord d’un bateau de patrouille maltais. L’Espagne en prendra en charge 60, l’Allemagne, 50, le Portugal, 30, et le Luxembourg, cinq. Les autres resteront à Malte.
Pour la première fois, plusieurs pays européens se répartissent l’accueil de migrants, sans tenir compte de l’accord de Dublin. Cet accord prévoit en effet que c’est le pays de premier accueil qui doit prendre en charge les migrants et que toute demande du statut de réfugié dans un pays européen ne peut être faite qu’à partir de ce pays de premier accueil. Conséquence : au lieu d’une coopération entre pays européens pour l’accueil des migrants, on assiste à la fermeture de plus en plus de pays pour éviter ce premier accueil et le faire porter aux voisins, au nom d’une peur de ‘l’envahissement’.
Ce nouvel évènement va-t-il permettre d’avancer dans la direction proposée par le parlement et la Commission européenne : l’établissement de quotas de répartition de l’accueil entre les pays européens ?
Sans hésitation, Virginie Guiraudon, sociologue politique et directrice de recherche au CNRS, répondait par la négative sur France Inter, vendredi matin. (Pour ré-écouter l’émission, cliquer ici).
Elle souligne qu’aucune solution pérenne n’est mise en œuvre sur les traversées de la Méditerranée et qu’on continue à laisser les associations gérer comme elles peuvent. Cette question des migrations est réduite à une simple question humanitaire.
Pour ce qui concerne la position particulière de la France, elle note que le gouvernement français a réussi, encore une fois, à empêcher que l’Aquarius accoste dans un port français, afin que la France ne soit pas considérée comme un pays de premier accueil, malgré sa façade méditerranéenne. De plus, il y a un an, la Commission Européenne proposait une répartition des migrants pour soulager l’Italie et la Grèce, avec un système de quota par pays européen (réforme non adoptée par le Conseil européen des Etats). Mais le quota pour la France était de 60 000. Et depuis cette date, la France en a accueilli 6 000 !!! Et aujourd’hui à Nantes, 400 migrants sont encore SDF au square Daviais (en attendant une nouvelle expulsion ???).
Etudier sérieusement le phénomène des migrations :
Virginie Guiraudon regrette que les 700 chercheurs, proposant que le phénomène des migrations soit sérieusement étudié, n’aient pas été entendus par le Président de la République, pas plus que les 450 associations et organisations qui proposaient des Etats Généraux de l’Immigration.
Dans un précédent article de ce blog, j’ai évoqué les chiffres d’une étude de l’ONU de 2013 sur les migrations dans le monde, relayé par ‘Alternatives économiques’ (Pour relire l’article, cliquer ici).

Depuis cette époque, des changements ont eu lieu :
- Le nombre des migrants était au total de 217 millions en 2013. Il a augmenté les années suivantes, jusqu’à un pic en 2015. Depuis, les migrations sont en déclin et se chiffrent aujourd’hui à 246 million ;
- En 2013, l’Europe accueillait 71 millions de migrants, dont 37,8 millions d’européens, 18,6 millions d’asiatiques, 8,9 millions d’africains, 4,5 millions d’américains du Sud, …
- En 2013, 31,3 millions d’africains quittaient leur pays d’Afrique, dont 15,3 millions pour un autre pays d’Afrique. Aujourd’hui, on estime que ce sont 80% des migrants africains qui vont vers un autre pays africain.

D’autre part, les motivations de la migration sont diverses : guerres, attentats, sécheresse et changements climatiques, inégalités, misère,… Mais les migrants, les jeunes en particulier, ne sont pas les plus pauvres et les moins formés. Ce sont souvent des gens débrouillards et motivés, qui ont envie de travailler, d’entreprendre, ce que leur pays ne leur permet pas.
Dans ces conditions, la coopération de l’Europe avec les pays d’origine est très importante : comment les aider à ce que leurs jeunes aient envie de rester ?

Mais, de toutes manières, les migrations ne cesseront pas. Et dans le même temps, la pyramide des âges se modifie dans nos pays européens (en Allemagne, mais aussi en France aujourd’hui). Et nous aurons de plus en plus besoin d’une main d’œuvre jeune et qualifiée. Alors, pourquoi ne pas organiser ces migrations, accueillir correctement et former ces personnes ?
Il faut oser mettre en avant une autre logique que celle véhiculée par l’extrême droite (et de plus en plus la droite), basée sur la peur, la division et l’enfermement sur soi. L’Europe et la France ont tout à y gagner.

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